Gainsbourg (Vie Héroïque)
Bédéaste de grand talent, Joann Sfarr raconte dans son premier long-métrage l’existence de Serge Gainsbourg, à travers les refrains connus et les femmes qu’il a rencontrées et l’ont sans doute inspirées. Parfois, une marionnette, ressemblant à «Gainsbarre», prend le relais de l’acteur Eric Elmosnino pour incarner le mauvais génie du chanteur…
Comme le cinéaste l’a répété à de nombreuses reprises devant la presse, «Gainsbourg (vie héroïque)» doit être considérée comme une «fantaisie libre», une rêverie personnelle (mais très inspirée), sur un antihéros qui aura su retourner comme un gant l’hypocrisie crasse nous tenant lieu de vertu.
Perspicace, Sfarr a parfaitement perçu la fêlure intime de son protagoniste qui a très vite compris qu’il ne tiendrait pas les promesses de l’enfance. Avec un tel sentiment, impossible de jouer au héros, sinon en exagérant les symptômes de la déchéance, jusqu’à la bouffonnerie!
Vincent Adatte
Percy Jackson le voleur de foudre
Âgé de dix-sept ans, en butte à un beau-père alcoolique, Percy se sent à l’aise dans l’élément liquide, au point de traînailler sous l’eau pendant un temps dépassant notre entendement. Rien que de très normal pour un demi-dieu descendant de Poséidon! Cette destinée surhumaine va pourtant singulièrement compliquer son existence de cancre new-yorkais.
Poursuivi par l’ire de Zeus en personne, qui l’accuse d’avoir volé sa foudre divine, Percy va devoir se coltiner une galerie mémorable de monstres issues de la mythologie grecque, tout en essayant d’extraire sa pauvre maman du Tartare cher à Hadès…
Le nouveau film du réalisateur de «Madame Doubtfire» actualise de façon très humoristique la mythologie grecque C’est ainsi qu’il place au sommet de l’Empire State Building l’entrée de l’Olympe. Dans le même esprit frondeur, Columbus situe la Porte des Enfers à Hollywood, qu’il décrit comme une véritable usine à briser les rêves!
Adeline stern
Océans
Après les cieux immenses du «Peuple migrateur», Jacques Perrin nous convie à explorer la faune des océans profonds avec, en ligne de mire, cette belle idée que seul le spectacle indicible de la nature peut nous incliner au respect.
En guise de réponse à un enfant qui lui demandait: «C’est quoi l’océan?», Perrin a démultiplié pendant quatre ans les équipes de tournage. Celles-ci s’en sont allées filmer les flots bleus aux quatre coins de la planète avec pour mission d’en ramener des images en mesure de sidérer le plus blasé des spectateurs, histoire de ranimer notre faculté d’émerveillement, jalon indispensable de toute prise de conscience écologique.
De façon répétée, «Océans» réussit la gageure de nous donner l’impression du «jamais vu», magnifié il est vrai par le grand écran et une mise en scène spectaculaire ayant le don de ranimer notre âme naïve d’enfant qui se demande sans cesse: «Mais comment ont-ils faits?».
Adeline Stern
Loup
Après le très réussi «Dernier trappeur» qu’il avait réalisé en 2003 dans les grands espaces glacés du Yukon, le réalisateur français Nicolas Vannier s’est aventuré dans les vastes steppes de Sibérie occidentale pour y tourner un nouveau «vrai faux documentaire» de la même veine et
toujours de saison!
Promu au rang envié de gardien d’un gigantesque troupeau de rennes d’une importance vitale, un adolescent un brin rebelle brise net un tabou tribal en protégeant une louve et ses petits, entraînant dans son impiété la jolie Nastazia dont il est amoureux...
Le cinéaste dit avoir conçu son deuxième long-métrage en hommage à la tribu nomade des Evènes dont il a partagé, admiratif, le rude quotidien pendant près d’un an. Interprété par des acteurs amateurs francophones aux traits asiatiques, son film constitue un dépaysement permanent, émaillé de paysages grandioses et scandé par une musique non moins fascinante.
Vincent Adatte
Sherlock Holmes
Le fameux Sherlock Holmes (Robert Downey Junior) et son fidèle faire-valoir Watson (Jude Law) as- sistent à la pendaison de Lord Blackwood (Mark Strong), un criminel condamné pour avoir sacrifié d’innocentes jeunes femmes lors de cérémonies diablement hérétiques.
Peu après, l’odieux personnage est aperçu bien vivant rôdant dans un cimetière. Comme il poursuit ses abominables méfaits, au point d’installer le chaos dans toute l’Angleterre, Holmes n’a d’autre choix que de rouvrir l’enquête. Le détective se lance alors dans une aventure imprévisible où la magie noire va jouer un rôle essentiel.
Pour notre plus grand plaisir, Guy Richtie réinvente complètement le personnage créé par Sir Conan Doyle vers 1890. Le réalisateur de «Arnaques, crimes et botaniques» (1998) et de «Snatch» (2000) le dépossède en effet de son esprit rationnel d’origine pour lui donner une dimension fantastique inédite, décuplée par des effets spéciaux impressionnants.
Adeline Stern
Baba’s Song
Samedi 13 février soirée africaine : le film sera précédé d’un repas dans le thème dès 19h et suivi de diverses surprises.
De nationalité allemande, Wolfgang Panzer a installé sa société de production en Suisse après le succès de «Broken Silence» (1995). Pour mémoire, cette comédie très spirituelle, aux deux sens du terme, retraçait les pérégrinations d’un moine chartreux contraint de courir le monde pour sauver son couvent menacé de vente.
Très applaudi à Locarno, le nouveau film de Panzer s’attache aux pas de Baba, un jeune garçon du Malawi, muet depuis la mort de ses parents. Sur le point d’être adopté par deux Européennes, l’enfant s’enfuit de l’orphelinat et se retrouve dans la rue où il rencontre Joe, un gosse fugueur comme lui, mais très astucieux.
L’union faisant la débrouillardise, les deux mômes s’allient pour survivre de larcins et de musique, car Baba a un véritable don en la matière... A travers leur amitié sans failles, toujours à hauteur d’enfant, le cinéaste brise un nouveau silence en montrant dans ce conte musical très émouvant les réalités profondes de l’Afrique d’aujourd’hui.
Vincent Adatte
Max et les Maximonstres
Le cinéaste Spike Jonze a mis sept ans à mûrir l’adaptation long-métrage de «Max et les Maximonstres», chef-d’œuvre de la littérature enfantine. Une véritable gageure quand on sait que l’ouvrage de Maurice Sendak, dont le réalisateur est un ami personnel, compte moins de cent lignes!
Condensé de rébellion, Max hurle sa rage à sa mère et à sa sœur aînée de ne pas être pris en considération. Après avoir menacé de dévorer sa maman, Max disparaît dans la nuit, revêtu de son seul costume de loup. Cinglant vers l’inconnu, «là où sont les choses sauvages» (titre original du livre et du film), il aborde une île habitée par d’étranges créatures...
Vu par Jonze, avec la complicité de Sendak, l’état d’enfance apparaît alors dans sa vérité la plus nue: un amoncellement d’émotions intenses dont il est parfois difficile de se protéger, le rêve ou l’imaginaire échouant dans sa mission compensatrice. Un film sublime qui fait grandir, à découvrir en famille... ou seul, en tant qu’adulte en devenir !
Adeline Stern
Le Concert
Déchu en pleine gloire pour avoir refusé de licencier ses musiciens juifs, le chef d’orchestre du Théâtre Bolchoï a été rabaissé au grade de «technicien de surface». Trente ans après ces faits typiques de l’ère Brejnev, Andrei Filippov intercepte un téléfax du Théâtre du Châtelet qui invite l’orchestre officiel du Bolchoï à se produire sur la prestigieuse scène parisienne.
L’ex-maestro bat alors le ban de ses anciennes ouailles déclassées et les convainc de reprendre leurs instruments pour aller jouer à Paris le concert pour violon et orchestre de Tchaïkovski, son œuvre fétiche.
Même si la présence du véritable directeur du Bolchoï, en vacances dans la capitale française, complique un peu la tâche de l’usurpateur, son ensemble de bras cassés est bien décidé à prendre sa revanche sur le destin et l’intolérance... Grand succès en France, le nouveau film du réalisateur de «Vis, va et deviens» (2005) brasse les grands sentiments avec un enthousiasme contagieux.
Adeline Stern
Le père de mes enfants
Sans le citer, la réalisatrice du «Père de mes enfants», dont c’est le deuxième long-métrage après «Tout est pardonné» (2006), évoque dans son nouveau film la figure du producteur Humbert Balsan. Avec une grâce lumineuse, Mia Hansen-Løve retrace les derniers jours de ce funambule idéaliste, avant son suicide en 2005.
Alter ego de Balsan, Grégoire (Louis Do de Lencquesaing) se bat pour faire exister son idéal de cinéma, pour permettre à des auteurs de tourner des films qui ne lui rapportent rien, sinon la possibilité de financer les suivants.
Profondément bienveillante, la cinéaste décrit tout d’abord l’engrenage qui aura raison de cet homme à la fois fort mais si fragile. Après avoir décrit le vide laissé par sa disparition au sein de ses deux «familles», celle de ses collaborateurs et celle de sa femme (Chiara Caselli) et de ses deux filles, Hansen-Løve conclut sur une note optimiste, qui voit l’emporter l’idée de transmission, de vocation.
Adeline Stern
The Limits of Control
L’étonnant «Limits of Control» commen- ce par un exergue citant les deux premiers vers du «Bateau ivre» de Rimbaud («Comme je descendais les fleuves impassibles / Je ne me sentis plus guidé par les haleurs») qui sonne comme un avertissement pour le spectateur, lequel ne va pas tarder à être effectivement livré à lui-même.
Quatre ans après «Broken Flowers», le dixième long-métrage de Jim Jarmusch colle aux basques d’un tueur solitaire qui arpente l’Andalousie, exécutant laconique d’une mission mystérieuse dont le sens est sans cesse différé, jusqu’à un dénouement du genre stupéfiant!
Sillonnant les grands espaces ibères, le séide tiré à quatre épin- gles reçoit ses instructions en sirotant deux expressos toujours servis dans deux tasses différentes... Avec l’humour maigre, qui le caractérise depuis toujours, Jarmusch déconstruit le genre de façon radicale et signe l’un de ses films les plus déjantés. Avis aux amateurs!
Vincent Adatte