L’étrange histoire de Benjamin Button
Le septième long-métrage du réalisateur de Fight Club (1999) et Zodiac (2007) est très librement inspiré d’une nouvelle de Francis Scott Fitzgerald parue en 1921.
Dans un hôpital de la Nouvelle-Orléans, alors que s’approche l’ouragan Katrina, une vieille femme mourante demande à sa fille de lui faire la lecture d’un carnet dans lequel un homme a écrit son autobiographie. La jeune femme s’exécute. Elle découvre ainsi non seulement que l’homme en question est son père, mais qu’il a vécu une existence à rebours pour le moins extraordinaire… Par retours en arrière successifs, le spectateur découvre alors L’étrange histoire de Benjamin Button, né en 1918 dans un corps d’octogénaire, qui va rajeunir au fil du temps, pour mourir nourrisson.
Au cours de cette traversée du siècle, Benjamin (Brad Pitt) rencontre Daisy (Cate Blanchett). Ce n’est encore qu’une enfant quand le vieillard de dix ans fait sa connaissance, mais l’étrange phénomène dont il est la victime lui permettra de l’aimer des années plus tard, dans la plénitude de sa beauté… Avec un art subtil des effets spéciaux qui tient d’une véritable alchimie, Fincher filme ce mélodrame temporel comme un rêve éveillé, une énigme merveilleusement irrésolue…
Histoires enchantées
Suite à un excès de confiance de son père, décédé depuis lors, Skeeter Bronson (Adam Sandler) est devenu l’homme à tout à faire de l’hôtel dont il aurait dû normalement hériter. En butte à un patron vraiment odieux (Guy Pearce), le brave Skeeter rêve pourtant d’épouser sa charmante fille… Pour aider sa sœur Wendy (Courteney Cox), une institutrice qui connaît de gros soucis professionnels, Skeeter accepte de veiller sur ses deux enfants pendant une semaine.
Dans les moments délicats, Jill (Keri Russel) assiste notre célibataire endurci très serviable mais un brin naïf. Le soir venu, Skeeter raconte à son neveu et à sa nièce une histoire de son cru, inventée de toutes pièces. Loin de s’endormir, les deux enfants font courir leur imagination, des plaines de l’Ouest à la Grèce antique, en passant par le Moyen Âge.
Le lendemain, Skeeter s’aperçoit que certains faits héroïques racontés la veille se sont concrétisés de façon inexplicable. Il comprend alors qu’il peut tirer un avantage de ce pouvoir mystérieux. Persuadé que ses histoires abracadabrantes vont peut-être améliorer son sort, il se donne de plus en plus le beau rôle… Charmant et familial, dans la lignée fantaisiste de Il était une fois !
Aide-toi, le ciel t’aidera
Révélé en 1988 par Drôle d’endroit pour une rencontre, le cinéaste français François Dupeyron mène depuis une carrière singulière, réalisant comme le faisait jadis un autre François (Truffaut) des films qui ne se ressemblent guère. Thriller fantastique (La machine), tragédie des mutilés de la 14-18 (La chambre des officiers), immigration clandestine (Inguelezi), tous ces films ont pour dénominateur commun un talent indéniable, tant pour la mise en scène que la direction d’acteurs.
L’action de son huitième long-métrage se déroule au plus fort de la canicule en 2003, au cœur de la banlieue, plus précisément la cité des Mureaux, dont les jeunes ont défrayé à plusieurs reprises la chronique. Gérante noire d’une laverie, Sonia (Félicité Wouassi) a fort à faire avec ses quatre enfants. Le jour où elle doit marier sa fille aînée, sa cadette lui annonce qu’elle est enceinte. Pour ne rien arranger, ses deux fils se rappellent à son bon souvenir, l’un est arrêté pour trafic de drogue, l’autre affiche des tendances suicidaires.
Cerise sur le gâteau, son mari violent casse sa pipe. Avec le concours d’un voisin concupiscent, elle cache le corps, le temps de marier sa fille… De ce chaos où chacun essaye de survivre, Dupeyron tire pourtant matière à une comédie «optimiste» irrésistible!
Adeline Stern
Walkyrie
Patriote et fidèle serviteur de son pays, le colonel Claus von Stauffenberg considère Hitler comme un danger pour l’Allemagne. Décoré de la Croix de Fer en 1940, Von Stauffenberg, issu d’une très ancienne lignée aristocratique catholique bavaroise, est révulsé par l’idéologie nazie. Rejoignant secrètement, la résistance allemande dès 1942, il met au point l’opération Walkyrie qui vise à éliminer le Führer.
En cas de réussite, Von Stauffenberg a pour mission de faire arrêter tous les dirigeants nazis après la mort d’Hitler. Etant le seul parmi les conspirateurs à pouvoir approcher le dictateur sans éveiller le soupçon, l’officier placera lui-même la bombe sous la table du quartier général de la Wolfsschanze, le 20 juillet 1944…
Portée par Tom Cruise, cette superproduction est très attendue. Réalisateur du brillant et fort civique X-Men (2000), Bryan Singer a déjà abordé le thème du nazisme dans le très réussi Un élève doué (1998) qui évoque la rencontre entre un collégien californien et un ancien criminel de guerre. Pour mémoire, Cruise a créé le scandale en Allemagne, certains s’offusquant que cet adepte déclaré de la scientologie endosse le rôle de Von Stauffenberg… Gageons que le subtil Singer aura fait de cette ambiguïté le «cœur noir» de son film!
Vincent Adatte
Young@heart : I Feel Good!
La séance de dimanche 8 février aura un parfum particulier de fête et pourrait se finir en chœur!
Le spectacle offert par ce documentaire n’est vraiment pas banal! Une chorale d’octogénaires chante avec gourmandise des hymnes punks dus à des groupes rebelles comme les Clashs ou les Ramones… Avis aux juniors intéressés: formée en 1982 à Northampton, dans le Massachusetts, à l’initiative de Bob Cilman, alors jeune musicien, la chorale Young@Heart est interdite au moins de septante ans!
Depuis lors, cette formation, forcément en perpétuelle recomposition, s’est produite dans le monde entier. Le cinéaste britannique Stephan Walker a tourné son film au cours de l’année 2006, au moment où Cilman ajoute quelques titres au répertoire dont le fameux Schizophrenia du groupe avant-gardiste new-yorkais Sonic Youth, la rengaine très sexualisée I Feel Good du défunt James Brown ou encore le Yes We Can Can signé Allen Toussaint, avant que le staff de la «com» d’Obama n’en fasse son cantique!
Par le choix même de ces chansons, Cilman remet complètement en question notre représentation de la vieillesse, à l’image de cette soliste nonagénaire qui entonne de façon très symbolique le Should I Stay or Should I Go? (Je pars ou je reste?) composé et chanté par Joe Strummer, le leader des Clash disparu à cinquante berges! Au final, ce film en nous parlant ainsi de la mort, nous donne une furieuse envie de vivre… et de chanter!
Adeline Stern
Les ailes pourpres: Le mystère des flamants
Dans les années cinquante, l’oncle Walt avait lancé «True-Life Adventures», une série documentaire et animalière à succès. La firme fondée par le créateur de Mickey réoccupe aujourd’hui le créneau en constituant un nouveau label, «Disneynature». Prenant en compte notre souci écologique (le logo est un iceberg), cette entité inédite entend produire des films de qualité, à même de nous faire renouer avec l’émerveillement suscité par le spectacle de la nature.
Premier film fait au moule de cette nouvelle collection, Les ailes pourpres raconte, avec la complicité de Zabou Breitman au commentaire, la saga du cycle de reproduction des flamands roses qui, chaque année, se regroupent par centaines de milliers sur le lac Natron en Tanzanie, pour perpétuer l’espèce. Très vite, le spectateur tombe sous la fascination de ces volatiles si graciles.
Magnifiés par les deux co-réalisateurs, Matthew Aeberhard et Leander Ward, les échassiers nous font voir la vie en rose. Mais leur parade lacustre majestueusement démultipliée n’est pas sans risque. A peine nés, les petits flamands sont en effet une proie rêvée pour les marabouts à l’allure très gothique… La loi de la nature n’a que faire de notre ravissement esthétique!
Vincent Adatte
La Citadelle humanitaire
Samedi 31 janvier, «Rencontre d’un Cinéaste» : Frédéric Gonseth. La projection aura lieu en présence du cinéaste et d’André Rochat et sera suivie d’une discussion.
Entre 1963 et 1970, au Yémen, les républicains soutenus par l’Egypte nassérienne et les monarchistes qui s’accrochent au pouvoir se livrent une guerre civile sans merci. L’engagé volontaire André Rochat est envoyé au feu par le CICR. C’est la toute première mission de ce fils de boucher vaudois né en 1925, autodidacte et officier à l’armée. Avec son groupe de médecins, il installe un hôpital de fortune qu’il gère avec toute la rigueur d’un gradé.
Suivant le précepte du fondateur de la Croix-Rouge, Rochat prend des initiatives pour remplir sa tâche, donnant forme au devoir d’ingérence humanitaire qui, bien plus tard, deviendra l’un des chevaux de bataille de «Médecins du Monde». Son indépendance d’esprit et d’action ne tarde pas effrayer les diplomates du siège genevois du CICR qui vont le révoquer, en dépit de ses excellents résultats.
Revenant sur le théâtre des opérations avec son antihéros, le cinéaste documentaire Frédéric Gonseth retrace dans La citadelle humanitaire la trajectoire de cet homme hors du commun. Ayant eu accès aux archives personnelles de Rochat, le réalisateur de La Cité animale (2000) use à très bon escient de cette source de documents exceptionnelle pour évoquer ce chapitre clef de l’histoire «humanitaire».
Vincent Adatte
Mission en Enfer
Samedi 31 janvier, «Rencontre d’un Cinéaste» : Frédéric Gonseth. La projection aura lieu en présence du cinéaste et sera suivie d’une discussion puis d’un repas.
Ce n’est peut-être pas fortuit, mais Mission en enfer (2003) forme un diptyque passionnant avec La Citadelle réalisé cinq ans plus tard. Aboutissement de quatre années de travail, ce documentaire remarquable nous rappelle fort opportunément à notre devoir de mémoire. Images et témoignages à l’appui, le cinéaste Frédéric Gonseth dévoile un épisode complètement occulté de notre histoire récente.
Liée par un engagement très douteux avec l’Allemagne, la Confédération suisse a envoyé entre 1942 et 1943 quatre missions sanitaires sur le front de l’Est. Arrivés sur le champ de bataille, tous ces volontaires sont intégrés dans les équipes médicales de la Wehrmacht, avec ordre de ne soigner que les soldats allemands, alors qu’ils croyaient porter secours à tous les blessés, sans considération partisane, ainsi que l’exige le serment d’Hippocrate.
Pendant des mois, médecins et infirmières vont être les témoins impuissants d’atrocités répétées (massacre de prisonniers, déportations, famines planifiées). De retour au pays, ils se heurtent à un véritable mur. Leurs rapports pourtant accablants restent lettre morte. Pis encore, ils sont sommés de se taire par la Confédération. Soixante ans plus tard, ceux qui ont survécu décident de briser cette loi du silence indigne d’une démocratie…
Vincent Adatte
Twilight - Chapitre 1 : Fascination
Twilight fait un véritable tabac chez les ados. Pour qui suit l’actualité littéraire, pareil succès n’a rien d’étonnant! En 2005, l’écrivaine Stephenie Meyer publie le premier tome de «Fascination», une tétralogie fantastique dont l’ultime volet est sorti en traduction française fin octobre. Dans l’intervalle, cette auteure d’obédience mormone aura vendu près de dix-huit millions d’exemplaires de son ouvrage!
Bien sûr, ce filon a retenu l’attention d’Hollywood qui mise toujours sur les séries pour fidéliser le grand public. Heureuse surprise, l’Usine à rêves a confié la réalisation du premier épisode à Catherine Hardwicke, une réalisatrice indépendante dont le premier film, Thirteen (2003), ne manquait pas d’intérêt…
Agée de dix-sept ans, Bella Swan vient vivre chez son père qui habite dans une petite ville de l’Etat de Washington. Elle tombe alors sous la fascination de l’étrange famille Cullen, plus particulièrement du prénommé Edward. Très vite, Bella comprend que ce jeune et beau ténébreux est un vampire. Heureusement pour elle, Edward a réussi à réfréner ses instincts, au point qu’il en est devenu végétarien. Un amour passion réciproque réunit les deux protagonistes. Mais Edward tarde à consommer, de peur de retrouver dans l’étreinte le goût du sang…
Il Divo
Primé à Cannes, le nouveau film du cinéaste italien Paolo Sorrentino est une biographie au vitriol du politicien Giulio Andreotti. Sept fois président du conseil et vingt-et-une fois ministre, «L’Inoxydable», comme l’ont entre autres surnommé les journalistes, a été durant cinq décennies le marionnettiste de la scène politique italienne. Sénateur à vie depuis 1991, il manipule sans doute encore les hommes qui sont actuellement au pouvoir, ces derniers étant tous ou presque sortis de son sérail!
Dans son portrait à charge, Sorrentino n’y va pas de main morte, désignant Andreotti comme le grand responsable de tous les maux dont souffre l’Italie d’aujourd’hui. Artisan discret de collusions mortifères entre l’Etat, la Mafia et le Vatican, «Le Sphinx» a bâti sa carrière sur la conviction «qu’un homme de principes était condamné au ridicule».
Deus ex machina opérant depuis la coulisse, Andreotti s’est parfaitement identifié à son personnage de tireur de ficelles, au point d’en devenir lui-même ridicule! Avec le concours de l’acteur Toni Servillo, qui confère à son personnage une allure de vampire plutôt inquiétant, le réalisateur met admirablement en scène ses jeux de pouvoir, à la manière d’un opéra grotesque.