Luftbusiness
The Visitor
Les Noces rebelles
Kate Winslet et Leonardo Dicaprio font sombrer leur couple dans un film qui constitue une suite «impossible» à l’idylle tragique qu’ils nouèrent sur le pont du Titanic (1997) de James Cameron. Non sans audace, le cinéaste américain Sam Mendes creuse avec talent cette hypothèse iconoclaste.
Adapté du roman de l’écrivain culte Richard Yates, Revolutionnary Road paru en 1961, le quatrième long-métrage de Mendes ne ressuscite personne et raconte une histoire qui n’a aucun rapport avec la superproduction de Cameron, d’autant qu’elle se déroule dans les années cinquante. Pourtant, le spectateur n’a de cesse de mettre en relation les deux films, présence du ténébreux DiCaprio et de la romantique Winslet oblige!
Impitoyable, l’auteur des Sentiers de la perdition (2001) liquide l’aura romantique qui nimbait la brève rencontre maritime ancrée dans nos mémoires cinéphiles. Volontairement, le cinéaste commence son film par une scène de séduction entre ses deux protagonistes, April et Frank, dont la beauté laisse espérer une reprise de la romance «titanesque». Par le biais d’une ellipse brutale, Mendes nous fait alors sauter quelques années. Dans l’intervalle, le couple s’est marié, mais s’éloignent déjà l’un de l’autre, se trompant mutuellement…
Le code a changé
Fille du cinéaste Gérard Oury (La grande vadrouille), Danièle Thompson a longtemps cosigné les scénarios de son père, avant de passer à la réalisation avec La bûche (1999). Après Fauteuils d’orchestre en 2005, elle persiste dans la veine du film choral avec Le code a changé qui brode sur le thème imprévisible du «repas entre amis».
Avocate spécialisée dans les affaires de divorces, Marie-Laurence (Karin Viard) partage sa vie avec Piotr (Dany Boon), cadre au chômage, ce qui ne l’empêche pas de se réjouir d’étrenner sa nouvelle cuisine conçue par son ami Jean-Louis (Laurent Stocker), un cuisiniste réputé. Sur le point de sceller une alliance avec Lucas (Christopher Thompson), un ténor du barreau, Marie-Laurence organise un dîner auquel elle convie l’avocat, la femme de celui-ci, ses «meilleurs» amis et sa sœur.
Professeur de flamenco (Blanca Li), gynécologue (Marina Foïs), cancérologue (Patrick Bruel) ou cuisiniste, chacun essaye de se policer, évitant les sujets qui fâchent. Bien entendu, ces bonnes résolutions n’ont aucune chance de tenir toute la soirée… Même si la scène du repas constitue le cœur du film, Danièle Thompson joue avec le montage pour décrire l’avant et l’après-dîner de chaque protagoniste, conférant à son quatrième long-métrage une allure éclatée très divertissante.
Un autre homme
Dimanche 8 mars à 20h, la projection aura lieu en présence du cinéaste et sera suivie d’une discussion puis du verre de l’amitié.
Lionel Baier est sans nul doute l’un de nos auteurs les plus talentueux. Son cinquième long-métrage interrompt provisoirement la tétralogie qu’il a consacrée aux quatre points cardinaux et dont nous avons déjà découvert le premier volet, Comme des voleurs (à l’Est). Produit avec peu de moyens, mais une foi renversante en le pouvoir d’incarnation du cinéma, le cinquième long-métrage du réalisateur de Garçon stupide délaisse le principe de l’autofiction qui caractérisait son dernier film.
Librement inspiré des romans La vie meurtrière de Félix Vallotton et Bel-ami de Maupassant, Un autre homme s’attache aux pas incertains d’un jeune diplômé en littérature médiévale. François Robin (Robin Harsch) s’installe à la Vallée de Joux, parce que sa compagne (Elodie Weber) y a été nommée institutrice.
Engagé par le journal local, François Robin doit faire la critique positive des films programmés au cinéma du Sentier. Ignorant en la matière, il succombe au plagiat. Confondu, il n’en poursuivra pas moins son ascension dans les médias, grâce à la relation qu’il entretient avec Rosa Rouge (Natacha Koutchoumov), critique redoutée et redoutable… Un film d’apprentissage subtil et cruel, doué d’une étrange empathie pour les «apprenants» de la vie que nous sommes!
Sept vies
Le mélodrame est un genre cinématographique fragile qui progresse sur le fil du rasoir. Crânement, le cinéaste italien Gabriele Muccino s’y essaye avec talent, nous délestant au passage de quelques mouchoirs. Grâce aux succès de Juste un baiser (2002) et de Souviens-toi de moi (2003), Muccino a tapé dans l‘œil des décideurs hollywoodiens qui l’ont invité à poursuivre sa carrière outre-Atlantique.
Après avoir réussi son examen de passage en dirigeant souverainement Will Smith dans A la recherche du bonheur, le réalisateur transalpin enchaîne avec Sept vies et retrouve l’acteur afro-américain qui lui fait désormais confiance… Rongé par la culpabilité, Ben Thomas (W. Smith), un homme très riche, décide de se racheter en aidant sept personnes que la vie n’a pas trop choyées.
L’une d’entre elles s’appelle Emily (Rosario Dawson) et souffre d’une malformation cardiaque. Seule une transplantation pourrait la sauver! Peu à peu, Ben se rapproche de la jeune femme dont le sort l’émeut au plus profond (pour des raisons que l’on se gardera bien de révéler au spectateur)… En douceur, Muccino va jusqu’au bout de la logique sacrificielle du mélodrame, servi par un duo d’acteurs étonnants de justesse et de retenue.
Tandoori Love
Dimanche 1er mars : Grande soirée Bollywood. Soirée riche en couleurs, odeurs, goûts et surprises! Ce film sera précédé d’un repas indien.
En décembre dernier, Tandoori Love a été projeté dans le cadre du prestigieux Festival de Goa. Une véritable consécration pour le premier film suisse style «bollywood» jamais réalisé! Selon la presse locale, les très nombreux spectateurs présents auraient beaucoup apprécié le deuxième long-métrage du jeune réalisateur soleurois Oliver Paulus, qui raille avec un égal entrain les Indiens et les Suisses.
Sommelière à l’auberge du Cerf, nichée au plus profond de l’Oberland bernois, Sonja (Lavinia Wilson) coule des jours heureux avec Markus Hirschen (Martin Schick), son patron et fiancé. Tout va changer à la seconde où elle croise à la Migros le regard ténébreux de Raja (Vijay Raaz), un cuisinier indien. Le coudre de foudre est réciproque. Rapatrié à l’auberge, Raja va mettre en émoi les papilles gustatives de la clientèle du Cerf qui devient bientôt un rendez-vous obligé pour la jet set.
Tout va donc pour le mieux, jusqu’au jour où débarque une jeune starlette de Bombay qui exige qu’on lui rende séance tenante son précieux cuisinier… Pastiche savoureux des films «bollywood», Tandoori Love rend donc la pareille aux cinéastes indiens qui, depuis des décennies, viennent en Suisse filmer leurs stars chantantes sur fond d’alpes grandioses!
Slumdog Millionaire
Dimanche 1er mars : Grande soirée Bollywood. Ce film sera suivi d’un repas indien puis d’une avant-première dans le thème.
Grand vainqueur des récents Golden Globes et favori des Oscars à venir, le nouveau film du réalisateur de Transpotting et de La plage est un mélo trépidant filmé façon Bollywood! Tiré du livre de l’écrivain et diplomate indien Vikas Swarup, «Les fabuleuses aventures d’un Indien malchanceux qui devint milliardaire», le neuvième long-métrage de Danny Boyle synthétise de façon virtuose les douze nouvelles qui en constituent la substantifique moelle.
Orphelin de dix-huit ans vivant dans un bidonville à la périphérie de Mumbai (anciennement Bombay), Jamal Malik est sur le point de gagner la somme «colossale» de 20 millions de roupies (plus de 500'000 francs suisses) au jeu «Qui veut gagner des millions?», version hindi. Soupçonné de tricherie, le paria est arrêté par la police.
A l’inspecteur incrédule qui l’interroge, Jamal délivre alors le récit de son enfance malheureuse et révèle ainsi sa «méthode» qui n’a rien de malhonnête… Le réalisateur de Petits meurtres entre amis crée une opposition pleine de sens entre les séquences de plateau, mises en scène selon le décorum lourdingue inhérent à la télé globalisée, et les réminiscences colorées suscitées par les «aveux» de Jamal, filmées en numérique avec l’allégresse impavide des productions made in Bollywood.
Le fond et la forme
La projection aura lieu en présence du cinéaste et sera suivie d’une discussion.
Tourné deux ans après La bande du Parc Geisendorf (2006), le troisième long-métrage documentaire du cinéaste Frédéric Baillif a encore partie liée à sa première profession, celle d’éducateur social… Avec une lucidité impressionnante, Baillif suit cette fois les résidents et les accompagnants d’un foyer d’accueil genevois, pris dans les méandres d’un échange interculturel.
Sous la direction de la chorégraphe Margarita Sanchez, les jeunes se rendent au Burkina Faso où ils sont censés monter un spectacle avec leurs homologues africains. Malgré toute leur bonne volonté, leurs éducateurs sont très vite dépassés par un projet dont ils ont sous-estimé les exigences. Le constat est d’autant plus criant que les participants burkinabés font tout pour se montrer à la hauteur, sans états d’âme.
S’il donne la parole aux uns et aux autres, le cinéaste s’attarde à raison sur deux jeunes filles du foyer d’accueil, Malika et Amina qui rechignent à collaborer, ces deux adolescentes se faisant une toute autre idée du «voyage»… Peu à peu, l’échange culturel se métamorphose en une remise en question radicale de notre système d’éducation «professionnalisé» qui pallierait à tous les manques, parentaux et sociaux.
Vincent Adatte
La bande du parc Geisendorf
La projection aura lieu en présence du cinéaste et sera suivie d’une discussion puis d’un repas.
Situé au cœur de Genève, le parc Geisendorf jouit d’une bien mauvaise réputation. Les jeunes désœuvrés du quartier y traînent tout le temps, formant même une bande qui importunerait les passants. Cuites, bagarres, violences commises sur autrui, l’espace vert n’appellerait donc guère à la détente…
Pendant deux ans, Frédéric Baillif a opéré comme travailleur social dans les environs du parc Geisendorf, collaborant à un projet spécifique lié au sport. Il a été ainsi l’un des mieux placés pour juger de la réalité de ces rumeurs qui vont bon train dans ce quartier multiculturel. Passé au cinéma, Baillif a mis à profit cette longue immersion pour en tirer un documentaire saisissant qui a remporté le Prix TSR du meilleur film suisse aux Visions du Réel 2006.
Avec une équipe réduite, le réalisateur du Fond et de la forme s’est glissé dans le parc si décrié. Il a alors procédé à un casting «in situ», extrayant du soi-disant gang quatre jeunes âgés de 17 et 21 ans. Témoignant devant la caméra, Cédric, Michael, Marvin et Adly en oublient leur réflexe de bande et révèlent chacun une individualité passionnante. Sans juger, à contre-courant des clichés, Baillif dévoile alors toute l’importance que revêt pour ses protagonistes «leur» parc…