Sous surveillance
Le neuvième long-métrage de Robert Redford renoue avec un genre qu’il a beaucoup affectionné par le passé, le thriller politique et dénonciateur d’affaires «sales» dont l’Etat ne sort pas la tête haute, loin s’en faut! En 1969, un groupuscule de militants radicaux revendique une vague d’attentats aux États-Unis pour protester contre la guerre du Vietnam. La plupart de ses membres furent emprisonnés, mais quelques-uns disparurent sans laisser de trace…
De nos jours, l’arrestation de Sharon Solarz (Susan Sarandon), l’une de ses activistes en chef, attise la curiosité de Ben Shepard (Shia LaBeouf), un jeune journaliste ambitieux. Ben rouvre l’enquête qui le mène jusqu’à Jim Grant (Robert Redford), un avocat apparemment sans histoires…
A bientôt septante-sept ans, le réalisateur et acteur de «L’Homme qui murmurait à l’oreille des chevaux» n’a rien perdu de sa prestance ni de sa foi en des valeurs profondément éthiques. Bref, une vraie leçon de vie dispensée de la façon la plus haletante!
Vincent Adatte
Botiza
Dimanche 9 juin à 20h30, le film sera suivi d’une discussion avec les réalisateurs et du verre de l’amitié.
Le cinéaste vaudois Frédéric Gonseth est sans nul doute l’un de nos cinéastes parmi les plus attachants. Avec sa complice Catherine Azad, le réalisateur de «l’Ukraine à petits pas» nous entraîne cette fois en Roumanie, au fond d’une vallée perdue des Carpates, dans le village de Botiza qui compte trois mille âmes.
Articulé sur les quatre saisons, son nouveau documentaire décrit avec acuité et poésie les faits et gestes d’une communauté paysanne qui a su préserver son authenticité. Fidèles à leur culture, ses membres vivent en autarcie heureuse, au rythme tranquille de leurs chevaux à tout faire et à celui plus dansant de leur musique folklorique qu’ils s’obstinent à jouer durant leurs loisirs.
La gorge nouée, le spectateur pressent que cet Eden, pourtant parfois très pénible, ne saurait durer. Les enfants vont vendre leurs bras à l’étranger, alors que les chevaux sont menacés par une nouvelle loi sur la circulation routière. Raison de plus d’apprécier à sa juste valeur ce beau témoignage!
Adeline Stern
La fleur de l’âge
Producteur de télévision réputé, Gaspard Dassonville (Pierre Arditi) a fêté ses soixante-trois ans. Avec une solide abnégation, il se refuse à vieillir, en accumulant les conquêtes juvéniles dont il peine à discerner le caractère illusoire!
Entièrement bâti sur le déni de l’âge de ses artères, son quotidien va pourtant voler en éclats avec l’irruption de son père Hubert (Jean-Pierre Marielle), octogénaire devenu dépendant. Gaspard se voit en effet contraint d’accueillir chez lui ce vieillard rebelle et revêche, à la jeunesse d’esprit restée absolument intacte.
Paradoxalement, cette coexistence forcée avec son père «indigne» donne un sérieux coup de vieux à Gaspard. L’apparition de la séduisante Zara (Julie Ferrier), une aide-soignante aux références douteuses va exacerber leur conflit, le père et le fils se disputant âprement ses faveurs… Sous le couvert de la comédie, un premier long-métrage de fiction très révélateur!
Adeline Stern
Epic : La bataille du Royaume secret (3D)
Dans sa nouvelle «Douce Nuit» (1966), Dino Buzzati fait d’un jardin paisible un immense champ de bataille où luttent à mort moult insectes. Adorant les jeux d’échelles, le cinéma d’animation s’est emparé de ce «topos» en le dédramatisant, avec des films comme «Chérie, j’ai rétréci les gosses», «1001 pattes», «Arthur et les Minimoys» ou encore «Arriety».
Œuvre ambitieuse, par sa manière de mixer heroïc fantasy et fable écologique, la nouvelle production du créateur de la saga de «L’Âge de glace» raconte l’histoire mouvementée d’une jeune fille dont les parents sont séparés. Rendant visite à son père, un scientifique qui investigue sur une soi-disant peuplade nanométrique cachée dans la forêt, Mary Katherine est victime d’un sort et réduite à une taille millimétrique.
La voilà impliquée dans un affrontement sans merci entre les «hommes-feuilles» et des êtres destructeurs… Au bénéfice d’une technique 3D virtuose, «Epic» est un divertissement familial qui brille aussi par son intelligence.
Vincent Adatte
Fast & Furious 6
Lancée dès 2001, la franchise «Fast & Furious» connaît un succès pétaradant, à la longévité étonnante. Pour mémoire, elle constitue une résurgence d’un sous-genre cinématographique apparu aux Etats-Unis dans la seconde moitié des années cinquante.
L’action du sixième chapitre de cette saga vrombissante a été en grande partie délocalisée en Europe… Après avoir froissé moult carrosseries et pulvérisé maints enjoliveurs dans l’épisode précédent, nos héros du bitume se sont dispersés à travers le monde pour goûter à une retraite bien méritée.
Par la faute de chauffards très mal intentionnés, lesquels n’hésitent pas en enfourcher des tanks, le ténébreux Dom (Vin Diesel) doit pourtant battre le rappel de ses fous du volant. Il se promet aussi d’avoir une petite conversation avec la sculpturale Letty (Michelle Rodriguez) qui semble avoir cédé aux avances sonnantes et trébuchantes de cette concurrence déloyale… Un conseil, attachez vos ceintures!
Vincent Adatte
La Clé de la chambre à lessive
Samedi 1er juin à 18h le film sera projeté en présence des réalisateurs et suivi d’une discussion et du verre de l’amitié.
Œuvrant en duo, Floriane Devigne et Fred Florey ont signé avec «La Clef de la chambre à lessive» l’un des documentaires les plus remarquables de l’année. C’est donc de façon mérité que leur film a décroché au dernier festival des Visions du Réel de Nyon le Prix accordé par notre Télévision au meilleur film suisse, toutes compétitions confondues!
A en croire les sociologues, la buanderie collective serait une tradition purement «de chez nous». De ce point de vue, elle a longtemps incarné notre propension au «propre en ordre»… La chambre à lessive de l’immeuble sis au 85 rue de Genève à Lausanne montre toutefois que ce temps est révolu, exprimant à merveille le changement qui affecte notre modèle helvétique.
Installée dans le hall d’entrée, parce que les caves sont réservées à la prostitution, cette chambre à lessive a des usagers qui, pour la plupart, bénéficient de l’aide sociale. Engagée par le propriétaire et détentrice de la fameuse clef, Claudina va avoir fort à faire…
Vincent Adatte
La cage dorée
Empreint d’un humanisme, qui n’empêche pas des traits d’humour acérés, «La Cage dorée» vaut qu’on s’y laisse enfermer, histoire de partager les mésaventures attachantes d’un couple d’immigrés portugais, heureux habitants de la loge d’un immeuble parisien.
Maçon promu chef de chantier, José (Joaquim de Almeida) fait tourner l’entreprise de Monsieur Caillaux (Roland Giraud), un entrepreneur au bord de la faillite, tandis que sa femme Maria (Rita Blanco) joue à la concierge modèle pour satisfaire des locataires horripilants… Advient alors l’événement qui va plonger nos deux protagonistes dans un abîme de perplexité.
Les circonstances font que José et Maria pourraient hériter d’une maison au Portugal, mais à la condition de revenir au pays natal qu’ils ont quitté voilà déjà trente ans. Tous les nantis parisiens qui les exploitent de façon éhontée s’efforcent alors de les persuader de renoncer à leur projet de retour… Restés humbles, nos deux protagonistes en seront complètement déboussolés!
Adeline Stern
The Grandmaster
Portant à l’écran la biographie de Ip Man, l’un des grands maîtres du kung-fu, le réalisateur hongkongais Wong Kar Wai confère au film d’arts martiaux son sens sublime de la mélancolie et de la beauté, réinventant littéralement le genre!
Le réalisateur de l’inoubliable «In The Mood For Love» (2000) commence son récit en 1936. En proie à une mystérieuse concurrence, déstabilisé par l’Occupation japonaise, Ip Man doit fuir à Hong Kong où il fonde une école dont Bruce Lee sera l’un des élèves les plus assidus… Avec son sens inouï de la mise en scène, Wong Kar Wai livre un chef-d’œuvre qui capte avec subtilité le déclin des grands maîtres et de la Chine traditionnelle.
Jouant sur la dilatation du temps, tournant dans des décors fastueux, qui sont pour la plupart réels, le cinéaste atteint à une perfection chorégraphique qui dépasse le simple film de kung-fu, à même de bouleverser le spectateur qui n’aurait jamais vu de sa vie un «pas rasant» ou la fameuse «position de l’homme ivre»!
Vincent Adatte
La Maison de la radio
La parole a toujours été au cœur de la démarche cinématographique de Nicolas Philibert, Avec son vingt-huitième film le réalisateur de «Être et avoir» (2002) persiste, et signe l’un de ses documentaires parmi les plus aboutis, sinon le plus accessible.
Pendant une journée et une nuit, Philibert nous fait entrer dans «La maison de la radio» à Paris, gigantesque bâtiment circulaire qui abrite toutes les stations de Radio France, de France Culture à France Musique en passant par France Inter ou France Info. Créant un sentiment de proximité assez inouï, il met alors des visages sur des voix dont plusieurs nous sont familières, mais sans jamais attenter au mystère présidant à leur présence sur les ondes.
En résulte une série de moments de grâce, qui expriment toute la palette des émotions humaines, entre drôlerie, fatigue, émerveillement et exigence. Avec, à la clef, de retour chez soi, l’envie absolument irrépressible d’allumer la radio, histoire de faire durer le charme!
Vincent Adatte
Gatsby le Magnifique (3D)
Il est porté à votre attention que, sur demande d’une partie du public, ce film sera projeté soit en 3D soit en 2D. (Séance du 26 mai à 17h30 en 2D)
Présenté en ouverture du Festival de Cannes 2013, le nouveau film à grand spectacle du réalisateur de «Ballroom Dancing» et de «Moulin Rouge!» constitue la troisième adaptation cinématographique du roman culte de Francis Scott Key Fitzgerald. Elle s’annonce comme la plus audacieuse!
Publiée en 1925, cette satire d’une société américaine exclusivement basée sur l’argent est nourrie de l’expérience de Fitzgerald, aventurier bohême passant pour un raté… Au printemps 1922, Nick Carraway (Tobey Maguire) quitte son Middle West natal pour travailler dans la finance à New York. Il a alors pour voisin Jay Gatsby (Leonardo DiCaprio), mystérieux milliardaire qui ne tarde pas à le fasciner…
Se sentant des velléités d’écrivain, Nick commence à écrire un roman dont il puise les éléments dans l’existence éblouissante et ravageuse de Gatsby «le Magnifique»… Dix-sept ans après avoir dirigé DiCaprio dans «Roméo + Juliette», le cinéaste australien Baz Luhrmann lui confie à nouveau un rôle «bigger than life», qui fera date!
Adeline Stern